L'être humain est-il libre ?

Spinoza

On pense que l’esclave est celui qui agit par commandement, et l’homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n’est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c’est le pire esclavage et la liberté n’est qu’à celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison.

Quant à l’action par commandement, c’est-à-dire à l’obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur le champ un esclave, c’est la raison déterminante de l’action qui le fait. Si la fin de l’action n’est pas l’utilité de l’agent lui-même, mais de celui qui la commande, alors l’agent est un esclave, inutile à lui-même ; au contraire, dans un Etat et sous un commandement pour lesquels la loi suprême est le salut de tout le peuple, non de celui qui commande celui qui obéit en tout au souverain ne doit pas être dit un esclave inutile à lui-même, mais un sujet.

Ainsi cet Etat est le plus libre, dont les lois sont fondées en droite Raison, car dans cet Etat, chacun, dès qu’il le veut, peut être libre, c’est-à-dire vivre de son entier consentement sous la conduite de la Raison.

Texte choisi par André Alleyson